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Responsable de la souscription Marine France chez AXA XL

Le transport maritime vit une mutation historique. L’Organisation maritime internationale (OMI) s’est fixé un objectif ambitieux : atteindre la neutralité carbone en 2050, avec une première étape décisive dès 2030. Mais comment réduire drastiquement les émissions tout en maintenant la puissance et la fiabilité nécessaires aux navires transocéaniques ?

L’OMI demande une réduction d’au moins 20 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur d’ici 2030, puis de 80 % en 2050. En Europe, le règlement FuelEU Maritime impose une baisse de l’intensité carbone des carburants dès 2025, dans une logique well-to-wake qui prend en compte tout le cycle de vie du carburant. Ces contraintes accélèrent la recherche de solutions radicalement nouvelles.

A la recherche d’alternatives

Depuis plusieurs années, les armateurs explorent diverses options : propulsion vélique, optimisation hydrodynamique, systèmes de dépollution, nouveaux carburants. 

L’hydrogène et l’ammoniac suscitent beaucoup d’espoirs, mais posent aussi des problèmes considérables : stockage complexe, toxicité, nécessité d’adapter les navires et d’investir dans de nouvelles infrastructures portuaires, incertitude sur la disponibilité et les prix futurs.

Une étude récente du Global Centre for Maritime Decarbonization montre d’ailleurs que la majorité des armateurs envisage déjà d’utiliser deux familles de carburants ou plus d’ici 2030, signe qu’aucune alternative unique ne s’impose.

Le potentiel du nucléaire maritime

Dans ce contexte, la propulsion nucléaire revient dans le débat. Déjà maîtrisée sur les sous-marins et certains brise-glaces, elle change d’échelle avec les réacteurs modulaires de petite taille (SMR). 

Les défis restent néanmoins considérables :

• Une démarche qui s’inscrit forcément dans le temps long sur toutes les phases de vie du réacteur, de la phase de conception jusqu'au démantèlement, en passant par l'exploitation;
• Une acceptabilité réglementaire et commerciale encore incertaine, notamment pour la maintenance et le déclassement ; 
• Un investissement important en capital financier et humain sur de longues années ;
• Des expertises très spécialisées, nécessitant une formation approfondie des équipages.

Mais la dynamique progresse. En janvier 2025, le projet NuProShip a été lancé pour explorer la faisabilité des SMR de 4ᵉ génération dans la marine marchande. Et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) prévoit la mise en place d’un cadre international dès 2025 pour sécuriser le déploiement du nucléaire civil en mer.

La dynamique française s’affirme

La France dispose d’atouts singuliers pour jouer un rôle pionnier : un savoir-faire nucléaire reconnu, une expertise maritime solide et un secteur assurantiel structuré. 

Ces forces se sont exprimées en juin dernier lors du rendez-vous ParisMat, avec une table ronde spécifiquement consacrée à la propulsion nucléaire. 

Les échanges ont fait émerger quatre conditions clés : un cadre juridique clair, un financement adapté, une gestion crédible du risque et une formation spécialisée des équipages.

Le facteur humain, pivot de la transition nucléaire en mer

Au-delà de la technologie, c’est l’humain qui portera la réussite du nucléaire maritime. 

Exploiter un réacteur en mer exige des compétences hybrides, à l’interface du nucléaire, du maritime et de l’assurance. Former et certifier ces experts sera un enjeu déterminant. 

La France dispose d’un avantage stratégique en ce domaine grâce à son expérience nucléaire civile et à sa capacité à former des opérateurs hautement qualifiés.

L’assurance comme catalyseur de la confiance

Le nucléaire maritime ne sera pas seulement un défi technique : il sera un test de la capacité du marché de l’assurance à innover. L’absence d’historique en matière de propulsion nucléaire civile en mer oblige à inventer de nouveaux modèles actuariels, à créer des clauses contractuelles inédites et à concevoir des mécanismes de partage international. Les infrastructures portuaires et la valeur des navires évolueront, ce qui nécessitera une adaptation complète des couvertures.

Dans ce contexte, le rôle des assureurs et du risk consulting est central : non pas accompagner en périphérie, mais structurer la confiance qui permettra à la filière de passer de l’expérimentation à une adoption durable.

La propulsion nucléaire pourrait devenir l’un des leviers décisifs de la décarbonation du transport maritime. Mais sa viabilité technique, économique et assurantielle ne pourra être tranchée qu’à travers un dialogue étroit entre armateurs, régulateurs, ingénieurs et assureurs. La France, grâce à son écosystème unique, a une opportunité rare : transformer l’incertitude en opportunité et ouvrir la voie à une nouvelle ère du transport maritime.

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